mercredi 24 décembre 2008

Pourquoi les jeunes fuient l’agriculture


La résistance des banques à s’impliquer et l’absence des assurances sont les principales raisons qui font que les jeunes fuient le travail de la terre.

L’agriculture est entre de vieilles mains, sommes-nous tentés de dire, à voir la tranche d’âge qui active dans ce secteur. En d’autres termes, le secteur n’a pas de relève. Selon le président de la Chambre nationale de l’agriculture, Mohamed Chérif Ould El Hocine, «plus de 400.000 agriculteurs dépassent 50 ans». Pourquoi la jeunesse algérienne fuit-elle donc l’agriculture? Pour le conférencier, les réponses sont simples: «Les jeunes désertent le secteur de l’agriculture pour diverses raisons, à savoir les blocages qu’ils rencon-trent au niveau des administrations et des banques.»
Encore une fois, l’une des principales raisons est liée aux banques qui ne s’impliquent pas suffisamment dans le développement agricole. Selon les chiffres fournis par les services du ministère de l’Agriculture, seulement 12.000 agriculteurs traitent avec les banques alors que le secteur enregistre 1,2 million d’intervenants.
Pourtant, ces institutions financières auraient tout à gagner en finançant les activités agricoles telles que l’élevage et les activités annexes comme le conditionnement et la transformation. Le ministère de l’Agriculture a mis en place plusieurs mécanismes de garantie pour instaurer une relation de confiance entre les deux partenaires, les banques et les agriculteurs.
La formule du crédit «Rfig», lancée par Rachid Benaïssa constitue une preuve de l’engagement sans réserve de l’Etat qui a pris en charge les intérêts des agriculteurs dans le cadre de ce crédit. Cette réticence des banques a des répercussions sur le secteur et un coût. l’Algérie débourse annuellement près de 7 milliards de dollars afin d’assurer la facture alimentaire du pays.
Un autre aspect tout aussi important fait fuir les jeunes du secteur agricole. Il s’agit de l’assurance. «95% des agriculteurs ne sont pas affiliés aux assurances», selon Mohamed Chérif Ould El Hocine.
En effet, M.Ould El Hocine a dressé, lors d’une rencontre à Alger, un tableau peu reluisant de la situation des agriculteurs puisque sur les 806.000 agriculteurs adhérents à la CNA, seuls 5% sont affiliés aux assurances. Le chiffre est tout simplement décourageant!
L’intervenant a aussi souligné l’importance de la redynamisation du rôle des assurances et des banques à travers l’augmentation du nombre des agriculteurs bénéficiaires des différents services bancaires, et tributaires du facteur «confiance» entre l’agriculteur et l’établissement bancaire.
Dans le même sillage, le président du CNA n’a, dans aucun cas, remis en cause les efforts fournis par le ministère de l’Agriculture à la faveur de la redynamisation du secteur. Le président du CNA a évoqué également le problème de sécheresse qui a frappé le pays durant ces dernières années.
Le manque de main-d’oeuvre provoque la régression de la production. Selon M.Ould El Hocine, la production de tomate de l’année dernière, est de quelque 43.000 tonnes.
«Cette production est loin de satisfaire la demande nationale qui est de 80.000 tonnes», a-t-il estimé. D’autre part, le président de la CNA a estimé que cette production a enregistré des avancées importantes par rapport aux années précédentes, et cela, grâce aux efforts consentis par l’Etat et les fellahs.
«La production de la tomate en 1995 était de 16.000 tonnes.» Le conférencier avoue que la culture maraîchère en Algérie est en pleine expansion à la faveur du développement des techniques agricoles modernes qui sont introduites chez nous.
Mais beaucoup reste encore à faire car les capacités de production nationales ne sont pas toutes engagées. Il en est de même pour les viandes. M.Ould El Hocine a déclaré que l’Algérie est l’un des grands pays consommateurs de viande.
«Elle a importé en 2007 quelque 52.000 tonnes de viande, alors que lors de l’Aïd El Adha, les Algériens ont sacrifié quelque 6 millions de têtes de mouton», a t-il comparé. Cette approche est pour démontrer qu’il manque une structuration dans le domaine de la production des viandes.
«Il faut absolument structurer l’offre et la demande afin de fermer la porte aux spéculations qui rongent de plus en plus le marché algérien», a souligné le président du CNA. La majorité de ces viandes nous parviennent du Brésil. Les importations ont atteint 51.819 tonnes de viande dont 51 tonnes de viande bovine en 2007.
En attendant, il souligne la situation critique que vit le secteur tout en laissant paraître une lueur d’optimisme dans son intervention.
«Ce qui nous réjouit d’aller en avant aujourd’hui, c’est que d’un côté, les pouvoirs publics au plus haut niveau, s’intéressent au secteur de l’agriculture, et d’un autre côté les 806.000 agriculteurs inscrits au niveau de la CNA sont là pour relever le défi afin d’assurer leurs efforts dans l’économie nationale.»

Par : Abbas AIT HAMLAT

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